Le premier SEL de France

Il a été créé en janvier 1994 à Château-Renault


Quand les "billets bleus" sont apparus, l'appellation SEL (Système d'Échange Local) n'existait pas encore!


Le but de l'expérience

Son but était uniquement d'expliquer grandeur nature les mécanismes de création monétaire, avec l'intention de provoquer une prise de conscience débouchant sur l'abrogation de l'article 25 de la loi du 3 janvier 1973, devenu ensuite article 104 du traité de Maastricht.

Son but n'était certainement pas de "jouer au commerçant" ni encore moins de frauder le fisc, le gouvernement ainsi que les citoyens ayant d'ailleurs tout à gagner du rétablissement de la souveraineté monétaire de l'État!


La différence de philosophie par rapport aux SELs

Les SELs embrouillent la compréhension par peur du fisc, en disant qu'ils ne créent pas d'argent mais du "lien social", qu'il ne s'agit pas de monnaie mais de troc, etc...

Par contre les "billets bleus" annonçaient clairement la couleur en affirmant qu'il s'agissait bel et bien de monnaie.


Comment les choses se passaient

Très bien la première année, où la pédagogie fonctionnait à merveille.

Les gens étaient très surpris et posaient énormément de questions jusqu'en 1995 où là, à cause de la télé, j'avais de plus en plus droit à des niaiseries du genre: "ouais ben c'est un SEL, c'est du troc!"...

Ceux qui disaient ça se croyaient peut-être bien informés mais en réalité ils n'avaient absolument rien compris. Et s'ils n'avaient rien compris c'était de la faute aux SELs qui ne disaient pas vraiment la vérité pour éviter d'avoir des ennuis avec les impôts...


La fin de l'aventure

Quand le SEL37 s'est créé les "billets bleus" n'avaient plus aucune raison pédagogique d'exister, sauf en allant plus loin en se transformant en SYSTÈME DISTRIBUTIF (où la monnaie ne sert qu'une seule fois car elle se détruit à l'achat).

Mais lors d'une réunion il n'y a pas eu assez de participants intéressés pour tenter l'aventure. Ils n'ont pas voulu à cause de la notion de service social, qui aurait été concrétisée, par exemple, en jardin à cultiver collectivement.

Depuis début 1998 les "billets bleus" n'existent plus, ce qui n'est pas une grosse perte car les participants ont (c'est logique) rejoint le SEL37.


Appel

Même si entre temps j'ai eu d'autres choses à m'occuper, je reste toujours ouvert à toute proposition de SYSTÈME DISTRIBUTIF!




Pour en savoir plus

Reproduction d'un article du mensuel LE NOUVEAU LIGÉRIEN
(journal indépendant d'information locale en touraine) N°6, juin 1994

EN INDRE-ET-LOIRE, ON N'A PAS DE PÉTROLE MAIS CERTAINS ONT DES IDÉES...


Notre deuxièmes interlocuteur fut Jean-Pierre Poulin, trente cinq ans. Ce dernier est professeur de guitare.

Avant les SELS...

Il a quant à lui magnifiquement su enrichir un axiome politico-financier irréfutable d'une déduction en trois points tout aussi "incontournables" comme on se plait à dire aujourd'hui (cf. le verso dubillet en...monnaie de singe reproduit ci-contre).

En effet, toute monnaie n'est jamais qu'un signe tout à fait conventionnel ne prenant valeur d'échange qu'à partir d'un accord, d'une règle du jeu établie entre partenaires. D'un autre côté, puisque les droits de l'Homme nous reconnaissent le droit de penser et de nous exprimer, nous avons tous le droit d'établir des accords entre nous. À partir de là, nous avons tous le droit de créer nos propres monnaies. C.Q.F.D.! Et il s'adresse tout particulièrement aux chômeurs, RMistes, exclus de tous poils. Il faut, en effet, noter qu'un réseau d'une dizaine de personnes existe déjà.

Bien persuadé que chacun peut faire son argent soi-même, ce qui compte, pour Jean-Pierre Poulin, "ce sont les échanges et personne n'a le monopole des échanges. Mais d'un autre côté, si l'on veut que ces échanges soient équitables, chacun doit tenir une comptabilité. De toute façon, il s'agit de fabriquer des billets d'échanges. Et en fabriquant ces billets, ce qui compte, c'est rendre service à l'autre et se tirer d'affaire soi-même. Ces billets pourraient donc permettre des échanges entre personnes n'ayant pas d'argent officiel. Il faudrait seulement, bien entendu, que ces derniers soient versés à une personne dont on sait qu'elle pourra nous rendre service en contrepartie."

Elle est gagée sur ce que chacun sait faire de ses mains (jardinage, maçonnerie, bricolage, etc.). Il s'agit, en réalité, de concevoir et réaliser une sorte de "planche à billets" prête à être photocopiéerecto-verso.

"Ensuite, on donne une photocopie à celui à qui on se propose de rendre des services assez réguliers et qui découpera les billets au fur et à mesure des besoins. Il nous paie donc avec la monnaie qu'on lui a donnée. En effet, c'est celui qui fabrique les billets qui prend le risque d'être payé par cette monnaie..."de singes" qui ressemble, somme toute, au principe du jeu de Monopoly mais délivré de l'obsession de faire fortune. Il ne se fait, en conséquence, pas prier pour accepter. En effet, cette monnaie est DONNÉE, il n'y a pas de remboursement, encore moins d'intérêts. Parce que nous, on n'est pas des escrocs. Pour nous, ça nous coûte une photocopie recto-verso! Avec cela, on peut acheter des oeufs, du lait, des légumes, si c'est un paysan qui est notre pratique, ou on fait faire réparer sa voiture ou sa mobylette, si c'est un mécano, etc. On paie avec la monnaie reçue en échange des services.Une fois qu'on a mis plusieurs personnes dans le coup, on les met en rapport les unes avec les autres (à l'occasion d'une réunion) et le réseau est né!"

Ce "système D" institutionnalisé n'a-t-il pas le mérite de montrer que l'humain doit nécessairement l'emporter sur la finance? Et l'on retrouve bien là les idéaux du socialisme distributif de Jacques Duboin tels qu'ils ont pu apparaître, en 1934, il y a soixante ans. Mais il est vrai: c'est fou comme on peut ignorer Jacques Duboin dans les manuels d'économie dite politique. Même si Jean-Pierre Poulin tient bien à ce qu'on ne fasse pas l'amalgame entre son "système D" ponctuel et conjoncturel et l'économie distributive qui est, elle, une théorie globalisante et mondialiste.

Bien sûr, au vu et au su de ce qui se passe aux quatre coins de la planète, on ne peut qu'en conclure que le bon grain a toujours poussé avec beaucoup plus de difficultés que l'ivraie. Mais comme le dit en grosses lettres Jean-Pierre Poulin sur le tract nous expliquant la mystification monétaire et l'économie distributive: NON TOUT N'A PAS ENCORE ÉTÉ TENTÉ...


Gérard LECHA




Le Frexit en bref